Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
18 avril 2010 7 18 /04 /avril /2010 17:25

LA VISION PROSPECTIVE DE P. TEILHARD DE CHARDIN

 

 

 

NOOGENESE ET « CONSTRUCTION DE LA TERRE »

« L’AUBE DE L’AGE TEILHARDIEN »

(Titre du livre de Georges Ordonnaud – L’Harmattan – 2007)

 

Conférence de Georges Ordonnaud à l’Ecole Cathédrale de Paris

(Dans le cadre du cycle des conférences de Gérard Donnadieu) – Avril 2008

 

 

 

 

Pendant toute sa vie, P. Teilhard de Chardin fut le jésuite dévoué au « Christ toujours plus grand », fidèle, en toutes circonstances, à son Eglise ;

                le savant de renommée internationale reconnu par ses pairs (il a laissé 15 tomes d’écrits purement scientifiques, fruits de ses travaux de géologue, de paléontologue et de préhistorien) ;

                l’homme de synthèse scientifique et religieuse. D’innombrables lettres, son journal, « les Ecrits du temps de la guerre » révèlent les grandes intuitions qu’il développera dans de très nombreux textes qui constituent une très grande partie des 13 tomes édités par le Seuil à l’initiative de Jeanne Mortier et dont les plus connus sont :

-          « le Milieu Divin » écrit en Chine en 1926/1927 ;

-          « le Phénomène Humain » écrit en 1938/1940, précédé par deux ébauches rédigées en Chine en 1928 et 1930, une postface et un appendice ayant été ajoutés à Paris en vue de ses rencontres d’octobre 1948 à Rome.

 

-          Les derniers mots du journal de Teilhard, quelques heures avant sa mort, le dimanche de Pâques, 10 avril 1955, peuvent résumer cette synthèse : COSMOGENESE – BIOGENESE – ANTRHOPOGENESE – NOOGENESE – CHRISTOGENESE.

 

L’apparition de la vie, puis de la réflexion, en raison de ce qu’il appelle la « loi » de Complexité-Conscience (Teilhard a mis en évidence, après l’infiniment grand et l’infiniment petit, un troisième infini de complexité) se réalisent par le franchissement de « pas » ou de « seuils » :

-          « pas » de la vie

-          « pas » de la réflexion

D’abord « pas individuel de la réflexion », puis « pas collectif de la réflexion » que nous sommes en train de franchir par la « Mondialisation » due, notamment aux progrès techniques qui nous rapprochent et nous font vivre en temps réel (radio, T.V., Internet et développement des moyens de transports), et par la naissance d’une « conscience planétaire » qui nous fait découvrir nos responsabilités croissantes dans la « Construction de la Terre », -notre « Maison Commune »-, dans la maîtrise de la Mondialisation et dans la Convergence des « Terrestres » que nous sommes.

 

Bref, Teilhard a accordé la plus grande attention à ce moment décisif de l’Evolution qu’est la NOOGENESE, qui, par l’ULTRA HUMAIN, nous conduira par étapes, mais pas nécessairement de façon linéaire, vers le POINT OMEGA, à la fois immanent et transcendant en qui culminera la CHRISTOGENESE.

 

C’est ce moment que j’ai appelé logiquement « L’Aube de l’Age Teilhardien » que nous allons consacrer cette étude.

 

               On comprend mieux ainsi que, dans des passages des textes précités, et, surtout à partir des années 1930 jusqu’à la fin de ses jours, dans des textes entièrement consacrés à ces thèmes, on découvre un autre Teilhard de Chardin, méconnu ou occulté sans doute parce que considéré comme moins important, évidemment à tort, surtout dans le contexte actuel :

 

-          c’est le Teilhard de Chardin, « prophète de la Mondialisation » réalisée par « serrage » de l’Humanité sur elle-même. Certes, à l’époque de Teilhard, celui-ci ne parlait pas de Mondialisation ou de Globalisation, mais de Planétisation, de Totalisation et de Socialisation ;

 

-          c’est le Teilhard de Chardin, soucieux de l’avenir de la Planète, de la « Construction de la Terre », de son « Organisation de plus en plus unitaire et orientée » et, par conséquent, de la maîtrise de la Mondialisation ;

 

-          c’est le Teilhard de Chardin, soucieux des responsabilités grandissantes qui sont désormais les nôtres ;

 

-          c’est le Teilhard de Chardin « politique » au sens noble du terme.

 

 

Ses préoccupations politiques sont pour lui la conséquence logique et cohérente de sa vision scientifico-religieuse : n’oublions pas de réaliser constamment cette mise en perspective.

 

Ses préoccupations sont également le fruit de son expérience personnelle.

 

L’EXPERIENCE PERSONNELLE DE TEILHARD DE CHARDIN – ELEMENTS BIOGRAPHIQUES

 

L’expérience personnelle de Teilhard de Chardin, en dehors de ses activités purement scientifiques et religieuses, est extrêmement variée et riche. Signalons, sans prétendre être exhaustifs, les points suivants :

 

-          La guerre 1914-1918 : ce fut pour Teilhard une première et terrible expérience qui l’a profondément marqué et, au cours de laquelle, sont nées ses grandes intuitions. Il vécut pendant quatre ans au milieu d’hommes de toutes conditions sociales, de toutes races et de toutes religions avec son régiment, le 4ème régiment mixte de Zouaves (pieds-noirs d’Afrique du Nord) et de Tirailleurs auprès de qui il retrouva l’Islam découvert avant guerre en Egypte.

-          Avant guerre et juste après guerre, au Muséum National d’Histoire Naturelle, c’est la rencontre avec les scientifiques, croyants ou agnostiques et ses premiers contacts avec des intellectuels communistes.

-          Séjours en Chine :

  • Contacts avec les jeunes intellectuels chinois, scientifiques, qui rejetaient, pour la plupart, la philosophie chinoise traditionnelle (échanges avec le Père Lefeuvre sj, à l’occasion du colloque de Pékin en octobre 2003) et qui voulaient construire la Chine moderne, soit avec le Parti Communiste naissant, soit avec Chiang Kai Shek.
  • Teilhard de Chardin, qui n’était pas un spécialiste de la langue, de la culture et de la philosophie chinoise, voyait juste quant à l’avenir politique et religieux de la Chine. Il écrira, en 1928, un texte pour la Commission synodale de Pékin sur les « tendances actuelles de la Chine moderne » qu’il connaissait mieux, puis il conseillera au Délégué Apostolique du Vatican de ne pas hésiter à « siniser le clergé », même au plus niveau, malgré l’avis défavorable de la plupart des missionnaires. Sur ce point, le Vatican le suivra !
  • Contacts avec les milieux scientifiques internationaux en Chine et dans le monde entier (Asie, Amérique du Nord, Europe) qui forment, pour lui, une communauté unie de « Terrestres » plus efficaces que la communauté politique : la SDN le décevra, après avoir suscité chez lui de grands espoirs.
  • Adoption des formes modernes de coopération en « passant aux chinois » comme il disait. Il deviendra, en effet, conseiller du Geological Survey de la République de Chine, estimant que là était l’avenir et non dans le maintien d’organismes étrangers « enkystés ».
  • La deuxième guerre mondiale vécue en Chine occupée par les Japonais.

-          Voyages multiples entre la Chine et l’Europe, aux U.S.A, au Japon, en Inde, en Birmanie, en Indonésie, en Ethiopie et en U.R.S.S, traversée en Transsibérien, durant lesquels il avait les yeux ouverts sur les problèmes de tous ordres de ces pays.

-          Retour en France en 1946, pendant 4 ans, dans un Paris connaissant un grande effervescence politique.

-          Voyage en Afrique du Sud et en Rhodésie au profit de la « Wenner Grenn Foundation ».

-          Installation à New York, à partir de 1950 dans un pays en pleine mutation, où, grâce à ses contacts avec le Père de Breuvery sj, avec lequel il vivait et qui occupait un poste de responsabilités à l’ONU, il était donc parfaitement au courant du fonctionnement de cette organisation (voir déclaration d’Ewert Cousins sur « Teilhard et les Nations-Unies » au colloque de New York, avril 2005).

 

Ces expériences multiples, jointes à l’élaboration de sa vision d’ensemble, expliquent le grand intérêt de la véritable vague de textes consacrés à la « Mondialisation » et à la « Construction de la Terre » à partir de 1930 et jusqu’à la fin de ses jours, écrits pour la plupart en Chine jusqu’en 1946.

 

LISTE DES TEXTES CONSACRES A LA « MONDIALISATION » ET A « LA CONSTRUCTION DE LA TERRE », TOTALEMENT OU EN PARTIE

 

-          9 mars 1931 (Pacifique) : « L’Esprit de la Terre » (tome VI – Le Seuil)

-          1936 : « Sauvons l’Humanité » (tome IX)

-          1937 : « L’Energie Humaine » (tome VI)

-          1939 : « La Grande Option » (tome V)

-          1939 : « Les Unités Humaines Naturelles. Essai d’une biologie et d’une morale des races » (tome III)

-          1939 (Noël) : « L’Heure de Choisir – Un sens possible de la guerre » (tome VII)

-          1941 : « Réflexions sur le progrès et sur les bases solides d’un Credo Humain commun » (tome V)

-          1942 : « Universalisation et Union » (tome VII)

-          1945 : « Vie et Planètes. Que se passe-t-il en ce moment sur Terre » (tome V)

-          1945 : « Un grand évènement qui se dessine : la Planétisation Humaine » (tome V)

-          1946 : « Quelques réflexions sur le retentissement spirituel de la bombe atomique » (tome V)

-          1947 : « La Foi en la Paix » (tome V)

-          1947 : (pour l’UNESCO) « Quelques réflexions sur les droits de l’homme » (tome V)

-          1948 : « Les directions et les conditions de l’avenir » (tome V)

-          1949 : (pour l’UNESCO) « L’Essence de l’Idée de Démocratie : approche biologique du problème » (tome V)

-          1949 : « Une nouvelle question de Galilée : oui ou non l’Humanité se meut-elle biologiquement sur elle-même ? » (tome V)

-          1950 : « Sur l’existence probable en avant de nous d’une Ultra-Humain » (tome V)

-          1950 : « Comment concevoir et espérer que se réalise sur terre l’Unanimisation humaine » (tome V)

-          1950 : « Du pré humain à l’Ultra Humain ou les phases d’une planète vivante » (tome V)

-          1950 : « L’Evolution de la responsabilité dans le monde » (tome VIII)

-          1951 : « La structure phylétique du groupe humain » (tome II)

-          1951 : « La convergence de l’univers » (tome VII)

-          1953 : « En regardant un cyclotron » (tome VII)

-          1953 : « Réflexions sur la compression humaine » (tome VII)

-          1954 : « Les singularités de l’espèce humaine » (tome II)

 

QUE NOUS DIT TEILHARD DE CHARDIN ET QUE NOUS INCITE-T-IL A FAIRE EN CE DEBUT DU XXIème SIECLE ?

 

Comme toujours, Teilhard part du constat d’un phénomène, d’une situation, dont il nous invite à prendre conscience et à en tirer les conséquences :

-          Constat du phénomène de « planétisation », de « mondialisation ».

-          Constat du « fantastique spectacle, droit sous nos yeux, d’une réflexion collective rapidement montante au même rythme qu’une organisation de plus en plus unitaire » (« Le Cœur de la Matière » - 1950 – tome XIII).

 

PRISE DE CONSCIENCE DU CONSTAT DE LA « MONDIALISATION » ET SES PROLONGEMENTS

 

Pour Teilhard c’est une évidence, la « Planétisation/Mondialisation » résulte de multiples « serrages » (de nature démographique, technique, économique et financière, psychologique et sociologique, politique) qui compriment l’humanité, la resserrent sur elle-même et en rapprochent les éléments, mais lui font aussi courir de grands dangers.

 

Mais pour Teilhard, même les guerres ont contribué, jusqu’à présent, à faire converger les « Terrestres » :

 

« Non, pendant ces six années, et malgré tant de haines déchaînées, le bloc humain ne s’est pas désagrégé. Mais, dans les profondeurs organiques les plus inflexibles, au contraire, il s’est refermé sur nous d’un cran davantage. 1914/1918 – 1939/1945 : chaque fois un tour de plus est donné à l’écrou… Engagées par les Nations pour se dégager les unes des autres, chaque nouvelle guerre n’a pour résultat que de les faire se lier et s’emmêler en un nœud toujours plus inextricable. Plus nous nous repoussons, plus nous nous copénétrons.

Et en vérité, comment pourrait-il en être autrement ? (« Un grand événement qui se dessine : la ‘planétisation humaine’ - 1945 » - Pékin – Tome V – Le Seuil).

 

Bref, pour Teilhard « nous nous imaginions peut-être traverser seulement un orage, en réalité nous sommes en train de changer de climat » (« Une nouvelle question de Galilée : oui ou non, l’humanité se meut-elle biologiquement sur elle-même ? » - 1949 – Tome V).

 

« Une autre espèce de vie commence » (« Sauvons l’Humanité » - 1937 – Cahiers – Le Seuil)

 

A partir de ce constat, il faut développer chez les « Terrestres » un « Esprit de la Terre » (1931), car « si nous ne sommes pas tous à une même, à une assez haute température psychique, inutile de nous rapprocher et de nous fondre. Nous n’y arriverons pas » (« La Foi en la Paix » - 1947 – Tome V).

 

Ainsi, nous ferons émerger « Une Conscience Politique Mondiale », une conscience planétaire.

 

CONSTAT D’UNE REFLEXION COLLECTIVE RAPIDEMENT MONTANTE ET D’UNE ORGANISATION DE PLUS EN PLUS UNITAIRE ET PRISE DE CONSCIENCE DE NOS RESPONSABILITES

 

Nous appuyant sur le constat de la Mondialisation, il nous faut prendre maintenant conscience de nos responsabilités pour « construire la terre ».

 

Pour que « cette réflexion collective » affecte le plus grand nombre possible de « Terrestres », les progrès des moyens techniques de communication, notamment radio, TV, Internet, sont déterminants, mais des acteurs-relais sont indispensables. Ces acteurs sont :

-          La société civile (associations, syndicats, partis politiques, universités, collectivités territoriales, entreprises, églises, etc.) ;

-          les ONG de plus en plus nombreuses et efficientes ;

-          les clubs de personnalités et mêmes les shows médiatiques ;

-          et, bien entendu, les Etats-Nations, les groupes d’Etats-Nations comme l’Europe et les organisations internationales qui disposent des moyens d’accentuer cette réflexion collective et sont les seuls à pouvoir prendre les décisions planétaires indispensables.

 

« Organisation de plus en plus unitaire » de la NOOSPHERE, nous dit Teilhard qui parle aussi du « grand effort organisé et orienté : la Construction de la Terre ».

 

« Nous sommes la pointe responsable du processus cosmique » (lettre de Teilhard du 5 août 1941), désormais comptable de l’avenir de l’humanité.

 

« Nous sommes la première génération dans l’histoire à être appelée à l’organisation et à la gestion du monde ». Ainsi s’exprime de leur côté Michel Albert, Jean Boissonnat et Michel Camdessus dans leur ouvrage « Notre Foi en ce siècle » (2002 – Alrea).

 

Cette organisation devra prendre en compte LES CONDITIONS ET LES DIRECTIONS DE L’AVENIR (1948 – tome V) définies par Teilhard, que nous devrons respecter pour faire face à des défis planétaires grandissants et pour rendre la mondialisation compatible avec une Humanité constituée de « personnes » - Teilhard parle d’un « Univers personnel » (1946 – tome VI) – et ainsi avec le besoin de solidarité (humanisation et mondialisation), tout autant qu’avec le besoin d’efficacité (maîtrise et régulation de la mondialisation).

 

Pour Teilhard les CONDITIONS à respecter sont de trois ordres :

 

-          SANTE : les conditions de santé recouvrent aussi bien les conditions matérielles (alimentation – soins médicaux – logement – énergie – eau potable) qui aboutissent à un « certain eugénisme », que les conditions intellectuelles (éducation) et culturelles (maintien de la diversité). Le respect de l’ensemble de ces conditions conduit actuellement à la définition de « Biens communs de l’Humanité » ou de « Biens publics mondiaux ».

-          SURVIE : Teilhard nous adjurait de ne pas mettre notre « planète au pillage », ce qui supposait déjà à son époque la maîtrise de notre patrimoine naturel et de nos ressources. A ce souci, très actuel, s’est ajouté la protection de l’environnement (lutte contre l’effet de serre notamment) et la maîtrise de nos besoins en adoptant de nouveaux comportements en raison de notre solidarité planétaire avec les générations actuelles et futures, ce que nous appelons le « développement durable ».

 

Pour survivre, Teilhard qui tient compte de l’apparition d’armes de destruction massive qui nous font courir les plus grands dangers, ne pouvait pas ne pas aborder le problème de la « maîtrise de la guerre » et de l’établissement de la paix.

 

« Dans une humanité aux rameaux convergents, la guerre ne peut que donner l’illusion de régler les problèmes parce qu’elle agit de l’extérieur, sur la surface des choses, si l’on peut dire.

Dès lors la guerre n’est plus fatale.

Par conséquent, si nous voulons survivre, ce n’est plus la guerre qui est fatale, c’est la paix ; …c’est la paix qui est possible et même inévitable, par structure » (« Vie et planète. Que se passe-t-il en ce moment sur terre » - Pékin – 1945 – Tome V).

 

-          SYNTHESE : ceci nous conduit à ce que Teilhard appelait les conditions de synthèse. Teilhard aimait à dire « ce n’est pas d’une tête-à-tête ou d’un corps à corps, c’est d’un cœur à cœur dont nous avons besoin » et il ajoutait :

 

« Le monde fera explosion s’il n’apprend pas à aimer. L’avenir de la terre pensante est organiquement lié au retournement des forces de haine en forces de charité » (« Les Unités Humaines Naturelles. Essai d’une biologie et d’une morale des races » - 1939 – tome III).

 

Dans ce même texte, Teilhard tire les conséquences de cette affirmation en préconisant l’établissement d’une « Ethique Internationale ou Planétaire » dans une « Charte de l’Humanité ».

 

Actuellement, l’idée d’une « Charte de la Terre » progresse, qu’il faudrait établir sur des valeurs universelles ou universalisables pour aboutir à une rationalité nouvelle acceptée par tous.

 

Passons maintenant aux DIRECTIONS DE L’AVENIR que, pour Teilhard, nous avons à prendre pour « construire la terre ».

 

-          FUTURISME : certes, s’il faut s’appuyer sur le passé, on ne peut construire notre avenir en le ressuscitant.

« Le salut pour nous est en avant » « (Esquisses d’un Univers Personnel » - Pékin – 1936 – tome VI). C’est évident, il n’est pas besoin d’insister.

 

-          UNIVERSALISME :

« Nous vivons…en ce moment…des évènements de dimensions planétaires. C’est donc à l’échelle de la planète qu’il convient, que je vous convie, de vous placer avec moi » (« Vie et Planètes » - Pékin – 1945 – tome V).

Il faut donc prendre conscience de l’ampleur des évènements de dimension planétaire pour y trouver des réponses planétaires. C’est la raison pour laquelle Teilhard a pu dire :

 

« Nous sommes avant tout des TERRESTRES…L’âge des nations est passé. Il s’agit maintenant pour nous, si nous ne voulons pas périr, de secouer les anciens préjugés et de construire la Terre…Il ne saurait y avoir de croissance pour aucun élément terrestre en dehors des progrès de la Terre elle-même ». (« L’Esprit de la Terre » - 1931 – tome VI).

 

Il faut cependant noter que le spectacle que Teilhard avait sous les yeux était celui « des quelques nations puissantes et impériales de l’époque qui s’isolent et se dressent logiquement amenées, par « universalisation » de leur nationalisme, à se poser en héritières exclusives des promesses de la vie ». (« L’Heure de choisir, un sens possible à la guerre » - Pékin – Noël 1939 – tome VII).

 

D’ailleurs dans un autre texte de 1939, il devait aller plus loin encore en écrivant : « Il faut des nations pleinement conscientes pour une terre totale ».

 

N’oublions pas, en effet, que la troisième direction de l’avenir, à côté du Futurisme et de l’Universalisme est le Personnalisme, car l’avenir nous emporte vers une « personnalisante totalisation » (« L’Essence de l’Idée de Démocratie » - 1949 – tome V).

 

-          PERSONNALISME

 

« L’Univers converge vers la personne »

« Pour ne pas nous tromper de route dans notre voyage vers l’avenir, nous n’avons qu’à nous orienter constamment dans le sens d’une plus grande personnalisation, soit individuelle, soit collective … »

(« Esquisse d’un univers personnel » - Pékin – 1936 – tome VI).

 

Teilhard précise le contenu de cette troisième direction, notamment dans :

« Les Unités Humaines Naturelles. Essai d’une biologie et d’une morale des races » (1939 – tome III), où se trouve la phrase déjà citée « Il faut des nations pleinement conscientes pour une Terre Totale ».

 

« Quelques réflexions sur les droits de l’homme » (1947 – tome V – texte destiné à l’UNESCO). Teilhard lance dans ce texte le projet de « Charte de l’Humanité ».

 

« L’Essence de l’Idée de Démocratie. Approche biologique du problème » (1949 – tome V – texte destiné à l’UNESCO). Teilhard y développe, notamment, de façon prophétique, le concept de participation au sens global du terme. « En vérité, n’est-ce pas ce besoin et cette exigence légitimes de participation à l’Affaire Humaine, c’est-à-dire ce besoin éprouvé par chaque homme de vivre co-extensivement avec l’Humanité, qui, plus profond que toute revendication matérielle, agite en ce moment certaines classes et certaines races laissées jusqu’ici « en dehors du jeu » ? »

Dans ce même texte Teilhard fait preuve d’un grand réalisme en affirmant : « malgré les conditions compressives, unifiantes, auxquelles nous nous trouvons soumis, l’Humanité est encore formée de pièces terriblement hétérogènes, inégalement maturées, dont la « démocratisation » ne peut s’opérer qu’à force d’imagination et de souplesse, suivant des modalités variant avec chaque fraction du Monde considérée ».

 

*****

 

LES REPONSES PLANETAIRES AUX DEFIS PLANETAIRES

 

Compte tenu de l’aspect planétaire des défis auxquels nous avons à faire face (écologiques, économiques, financiers, sociaux, politiques et religieux), les réponses planétaires prendront forcément la forme d’accords internationaux, résultant de longs dialogues, d’arbitrages et de compromis, réalisés par les seuls acteurs en mesure de prendre des décisions à l’échelle de la planète, c'est-à-dire :

-          les Etats-Nations et groupes d’Etats-Nations dont on a trop vite préconisé et annoncé la disparition alors qu’ils ont un rôle irremplaçable à jouer, comme on le voit mieux de nos jours.

L’Europe, puissance indéniable, mais qui a renoncé à tout impérium, ne fait plus preuve d’ubris après y avoir succombé, qui fait régner la paix entre ses membres après avoir connu des guerres sans fin, est mieux placée que quiconque pour définir les nouvelles normes de la vie internationale acceptables par tous, ce que tout le monde attend d’elle à condition qu’elle accepte d’assumer ce destin en toute indépendance.

-          Les organisations internationales qu’il convient de faire évoluer et de renforcer, qu’il s’agisse :

  • De l’ONU et des organismes de l’ONU. Cela implique la réforme du Conseil de Sécurité, de la Banque Mondiale, du FMI…et la création d’une Organisation Mondiale de l’Environnement et peut-être d’un Conseil de Sécurité Economique et Social ;
  • Du G8 qu’il conviendrait de transformer en G20/25 pour qu’il soit vraiment représentatif, qui resterait au début un « club » pour devenir par étapes un organisme de décision, s’appuyant sur les organismes de l’ONU, préconisé en 2002 par un rapport destiné à la C.O.M.E.C.E., réalisé par une Comité présidé par Michel Camdessus, sous la dénomination du 3G (Groupe de Gouvernance Globale) et s’inspirant explicitement du projet « d’Autorité Publique Compétence Universelle » souhaitée par Jean XXIII dans l’Encyclique « Pacem in Terris » (1963).

 

C’est le moment de rappeler le rôle joué par l’Eglise Catholique dans la perspective de la « Construction de la Terre », par Jean XXIII, notamment dans l’Encyclique précitée, par Paul VI qui marqua les esprits lors de son allocution devant l’Assemblée Générale de l’ONU, en lançant son cri répété « Plus jamais la guerre » et en reprochant, dans un style teilhardien, de « vouloir diminuer le nombre des convives au banquet de la vie », par Jean-Paul II, dont l’impact psychologique sur tous les peuples de la terre fut confirmé au moment de ses obsèques et tout récemment par Benoît XVI dans son discours à l’Assemblée Générale de l’ONU le 18 avril 2008, qui souligne que « l’on fait l’expérience du paradoxe évident d’un consensus multilatéral qui continue à être en crise parce qu’il est subordonné aux décisions d’un petit nombre alors que les problèmes du monde exigent, de la part de la communauté internationale, des interventions sous forme d’actions communes ». Enfin, il a fait préparer une Encyclique intitulée « Caritas in veritate… ».

 

CONCLUSION

 

Quelle meilleure façon de conclure cette étude qu’en proposant les trois citations suivantes ?

 

UN TEXTE PREMONITOIRE DE PIERRE TEILHARD DE CHARDIN : « LES SINGULARITES DE L’ESPECE HUMAINE » (1954 – tome II – Le Seuil). «…Si, en ce moment, parler d’organisation humaine universelle semble être (et est probablement, en fait) une utopie, qui nous dit que l’opération ne se fera pas toute seule demain, quand l’Homme se trouvera porté, par évidence généralisée de convergence phylétique, à quelques forme insoupçonnée de « Sens de l’Espèce ».

 

Et ici qu’on m’entende bien. Lorsque je parle de l’Humanité unanimisée, ce à quoi je pense n’a rien de commun avec une sorte d’euphorie confortable et vertueuse ; comme je le dirai mieux tout à l’heure, une hominisation de convergence ne peut finir qu’en paroxysme. Même cohérée sur soi, par la conscience enfin actuée de sa destinée commune, l’humanité passera donc demain, soit dans son effort pour définir et formuler l’unité qui l’attend, soit dans le choix et l’application des moyens les plus appropriés pour y atteindre, par des conflits intérieurs plus violents encore que ceux que nous connaissons. Mais ces phénomènes de tension justement parce qu’ils se développeront en un milieu humain beaucoup plus polarisé vers l’avenir, que nous ne pouvons encore l’imaginer, ont grand-chance de perdre la stérile amertume particulière à nos luttes présentes. Sans compter qu’au sein d’une telle atmosphère de « conspiration » certaines opérations de caractère universel peuvent être envisagées comme réalisables et dont il ne saurait être question dans l’état d’inagrégation psychique où nous végétons encore aujourd’hui.

 

---

 

LETTRE DE PIERRE TEILHARD DE CHARDIN AU PERE AUGUSTE VALENSIN (12 décembre 1919)

 

Pierre Teilhard de Chardin, jésuite, écrivait à son confident le R.P. Auguste Valentin, jésuite lui aussi :

« Aux diverses constructions humaines, je n’attribue aucune valeur définitive et absolue. Je crois qu’elles disparaîtront, refondues dans un tout nouveau inimaginable. Mais j’admets qu’elles ont un rôle provisoire essentiel, qu’elles sont des phases irremplaçables, inévitables, par où nous devons passer (nous ou la race) au cours de notre métamorphose. Je n’aime pas en elles leur forme particulière, mais leur fonction, qui est de construire mystérieusement, d’abord du divinisable, et puis, par la grâce du Christ se posant sur notre effort, du divin ».

 

CONCLUSION DE « L’AUBE DE L’AGE TEILHARDIEN » (2006-2007 – L’Harmattan, ouvrage de Georges Ordonnaud )

 

« Croyants et incroyants auront, donc, le plus grand intérêt à s’inspirer de la vision teilhardienne pour aborder ce nouvel âge, auquel nous avons cru légitime de donner le nom de l’homme exceptionnel que fut Teilhard de Chardin.

 

Il sera bien temps, pour chacun, durant cette longue période de construction de cette terre nouvelle dont nous avons les responsabilités, de continuer à réfléchir sur nos fins dernières et de vérifier si l’absence de perspective d’irréversibilité conduit effectivement à l’inaction ou à la grève et à l’interruption du processus d’évolution, comme Teilhard en avait la certitude.

 

A chacun de se déterminer librement.

 

Mais, en attendant, attachons-nous, tous ensemble, à réaliser cette « Humanité unanimisée » et à l’organiser en respectant les conditions et les directions indiquées par Teilhard.

 

Veillons, tout particulièrement, à respecter « ce besoin et cette exigence légitimes de participation à l’affaire humaine…qui plus profonds que toute revendication matérielle, agite en ce moment certaines classes et certaines races laissées jusqu’ici « en dehors du jeu ». Car, pour Teilhard de Chardin, l’égalité demandée par les hommes, c’est, avant tout, de ne pas être exclus des responsabilités, même si, bien sûr, leur exercice effectif sera amené à tenir compte d’une certaine relativité.

 

Nous pourrons alors aborder avec confiance « L’Aube de l’Age Teilhardien ».

 

Teilhard de Chardin, en Jean-Baptiste du « futur de l’humanité », nous redonne un avenir et une espérance. Il ne pouvait pas nous faire de plus beau présent ».

 

Partager cet article
Repost0

commentaires

C
Blog(fermaton.over-blog.com),No-22. - THÉORÈME OMÉGA.- La Science des Sciences.
Répondre

Présentation

  • : Le blog de convergence et progrès
  • : "Construire la Terre" : pour une mondialisation organisée, maitrisée et humanisée.
  • Contact

Recherche

Liens