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25 juin 2012 1 25 /06 /juin /2012 16:55

 

ALGÉRIE :1930 1954

CHRONIQUED'UN« ENFANTDUCENTENAIRE »

COMMENTLEDRAMEAURAITPUÊTREÉVITÉ

 

 

 

Né le 6 avril 1931 à ORAN, aux pieds de Notre Dame de SANTA CRUZ, j'ai donc été conçu au début de l'été 1930, au moment où, -dans la ferveur, l'enthousiasme et la croyance en un avenir radieux-, culminait la célébration officielle du centenaire du débarquement, en 1830, des troupes de Bourmont à Sidi Ferruch.

Cette chronique est donc celle d'un « enfant du centenaire ». Les fêtes, les défilés, les visites officielles des autorités françaises, au premier rang desquelles le Président de la République, se succédèrent pendant six mois pour célébrer, plus que la conquête, le remarquable développement du pays grâce au travail de tous ses enfants -européens et arabo-berbères-, et l'exemplaire œuvre civilisatrice de la France au profit de la population musulmane.

Or, en cette année 2012, ce qui occupe les esprits c'est le cinquantième anniversaire d'une indépendance de l'Algérie acquise en 1962, à l'issue d'une lutte dramatique depuis 1954, humainement coûteuse pour les musulmans et pour les européens, ces derniers condamnés à abandonner un pays qui était également le leur.

Pourtant, plutôt que la période 1954/1962, abondamment développée dans les livres et par les médias, c'est celle de 1930/1954, celle des occasions perdues qui auraient pu nous permettre d'éviter le drame, qui sera abordée. Elle est, en effet, beaucoup plus instructive et significative pour les responsables qui doivent avoir une connaissance profonde des réalités, une vision à long terme, le courage et la détermination pour régler au mieux et à temps, sans drame et avec un coût humain le plus faible possible, les problèmes qu'ils ont à affronter et à régler.

 

1930-1940 :Les fêtes etla premièreoccasion perdue

 

Les fêtes du centenaire étaient les fêtes de l'Algérie française...pour toujours et pour tous !

Pour les européens, bien-sûr, qu'ils soient d'origine métropolitaine, espagnole, italienne ou maltaise ou israëlite etc., qui constituaient une population socialement et politiquement aussi diversifiée qu'en France métropolitaine, -il n'y avait que 20.000 colons sur un million d'européens-, à qui on devait, avec l'aide de la Métropole, le développement économique et social du pays et la constitution d'une structure administrative moderne.

Pour les musulmans également, qui pour la grande majorité d'entre eux et notammant les aciens combattants et les élites civiles, souhaitaient une intégration plus complète, une « assimilation », en obtenant comme cela avait été le cas dès 1871 pour la communauté israëlite avec le décret Crémieux, une citoyenneté française qui leur aurait permis d'obtenir le droit de vote.

Malgré l'enthousiasme de 1930, le rappel du dévouement des troupes musulmanes et le calme qui régna dant toute l'Algérie durant la Grande Guerre, cette aspiration ne fut pas satisfaite. Le refus des députés français d'adopter le projet du Ministre du Front Populaire, Violette -peu auparavant Gouverneur Général de l'Algérie- prévoyant d'accorder le droit de vote à un nombre restreint de musulmans, provoqua une déception lourde de conséquence dans l'élite musulmane qui, comme Ferhat Abbas, le pharmacien de Sétif, avait été pour une politique d'assimilation dans le cadre exclusif de la République française, considérant qu'il n'y avait jamais eu de nation algérienne. Seul, un petit courant nationaliste qui commençait à naître en Algérie, notamment avec Messali Hadj, et auprès des travailleurs algériens en France métropolitaine, ne pouvait que se réjouire de cette première occasion perdue.

 

1940-1947 :L'humiliation puisle retour dela Francedans le campdes vainqueurs.Premières manifestationsnationalistes significatives.

 

L'humiliation de la France en juin 1940, suivie du drame de Mers-el-Kebir où l'on vit la flotte anglaise -celle de notre ancienne alliée- tirer sur la flotte française les 3 et 6 juillet 1940, faisant plus d'un millier de morts, ne provoquèrent pas de troubles dans la population musulmane, le prestige du Maréchal Pétain aidant. A cette période de calme succéda le débarquement américain en novembre 1942. Certes, les américains finirent par aider le Général de Gaulle à établir à Alger son gouvernement provisoire et à constituer une armée française -l'armée d'Afrique- qui participa à la campagne d'Italie, au débarquement en Provence et à la victoire finale, mais en même temps, la puissance manifeste de ce grand pays anti-colonialiste contribua à faire lentement prospérer un nationalisme qui allait être dans l'air du temps surtout après 1945. C'est ainsi que dès 1943, Ferhat Abbas abandonnait, désormais, toute perspective d'assimilation, créait l'Union du Manifeste Algérien (UDMA) visant à établir un état algérien qui, dans un premier temps, obtiendrait l'autonomie interne, comme me le révélaient ses jeunes partisans, étudiants comme moi à Alger, au début des années 1950.

Après le drame de Sétif, le 8 mai 1945 -manifestations réprimées à la suite de l'apparition pour la première fois d'une drapeau nationaliste, suivies de l'assassinat d'une centaine d'européens et d'une très dure répression par l'armée française, faisant plusieurs milliers de morts-, les gouvernements français de l'époque, auxquels participait la Gauche1, comprirent qu'il fallait prendre une initiative.

 

1947-1954 :L'application dustatut del'Algérie dévoyée Une nouvelleoccasion perdue

 

C'est ainsi que fut élaborée un STATUT DE L'ALGÉRIE, créant une ASSEMBLÉE ALGÉRIENNE élue par un double collège, dont un collège musulman. C'était s'orienter vers un début d'autonomie de l'Algérie dans le cadre de la République française. Son application effective aurait, sans doute, pu éviter le pire. Mais les élection du Collège musulman furent systématiquement truquées, si bien que les élus de ce collège étaient surnommés des « beni-oui-oui »!

Cette nouvelle occasion perdue devait être fatale. En effet, dans le mouvement nationaliste, le F.L.N et le M.N.A, considérant que la France ne voulait rien changer, s'orientèrent vers le déclenchement de la lutte armée dont les exemples en Afrique et en Asie ne manquaient pas, y compris pour nous à Madagascar et en Indochine.

C'est ainsi que les armes furent utilisées en Algérie en novembre 1954 et que la révolte prit de l'ampleur sur le plan militaire et par des attentats terroristes.

 

Malgré les appels de certains musulmans et d'européens, au premier rang desquels Albert Camus, pour éviter que la lutte aboutisse au départ des européens pour lesquels l'Algérie était également leur patrie, la guerre continua. Militairement, elle tourna progressivement à l'avantage de la France pour plusieurs raisons :

  • Envoi de 500.000 hommes (dont le contingent) ;

  • création de barrages électrifiés aux frontières de la Tunisie et du Maroc, qui privèrent rapidement les maquis de munitions et d'armes d'infanterie (parfois supérieurs aux nôtres commes les mitrailleuses allemandes (M.G) prélevées sur les stocks d'Europe de l'est ;

  • opérations de grande ampleur qui annihilèrent toute capacité offensive des maquis qui subsistaient dans l'Algérois et le Constantinois et destruction des réseaux terroristes dans les villes et surtout à Alger ;

  • lutte fratricide entre maquis FLN et MNA de Messali Hadj, illustrée par le massacre de Melouza qui entraina un rapprochement d'unités du MNA (Bellonnis) vis à vis de la France dans la région de Bou Saada (où j'ai pu le constater moi même durant mon service militaire dans l'armée de l'air) ;

  • liquidation par la FLN de plusieurs de ses unités (en Kabylie à Akfadou) qui voulaient se rallier à la France après l'arrivée au pouvoir du Général de Gaulle en mai 1958.

 

En effet, un dernier espoir devait naître en juin 1958. Le discours du Forum comportait une orientation positive, essayant d'effacer les occasions perdues des années précédentes, en affirmant qu'il n'y aurait dorénavant en Algérie que « des français à part entière avec les mêmes droits et les mêmes devoirs », en annonçant « une paix des Braves » et en lançant un vaste programme de développement économique et social -« Le plan de Constantine »- auquel j'ai personnellement participé de 1959 à 1961 sous l'autorité d'un grand Délégué Général, Paul Delouvrier.

Malheureusement, il était trop tard. Si le FLN était militairement neutralisé en Algérie, il constitua une véritable armée qui resta cantonnée jusqu'en juillet 1962 en Tunisie et au Maroc, il avait mis sur pied un Gouvernement provisoire de la République algérienne (G.P.R.A) présidé par...Ferhat Abba (!), il faisait progresser l'idéal nationaliste chez les musulmans algériens qui voyait s'éloigner peu à peu la perspective d'une Algérie française et réussit à rassembler sur le plan international, jusqu'à l'ONU, une véritable coalition anti-française.

C'est ainsi qu'on est arrivé, après des soubressauts dramatiques, aux accords d'Evian, à l'abandon d'une grande partie des Harkis et à l'exode d'un million d'européens, conséquence de l'indépendance immédiate, sans transition.

 

 

 

Depuis cette date, l'Algérie a connu une terrible guerre civile pour faire face au danger islamiste dont elle ne s'est pas encore totalement remise même si elle a servi d'antidote aux conséquences du « Printemps arabe » de 2011. Cinquante ans après une indépendance acquise dans la violence, imaginons ce que serait devenue l'Algérie si, par étapes pacifiques depuis 1930, dans le prolongement d'un Statut de l'Algérie débouchant sur une autonomie croissante dans le cadre de la République française, comme ce fut heureusement le cas en Afrique noire, permettant, comme le souhaitait ardemment Albert Camus, aux européens de rester aussi dans leur pays qu'ils auraient continué à moderniser avec l'aide de la France et de l'Europe. L'autonomie interne, puis, évidemment l'accession progressive à l'indépendance seraient intervenues sans drame.

 

L'Algérie, disposant de richesses pétrolières, gazières et minières, de productions agricoles qu'elle aurait continué à exporter en France et en Europe -concurrençant les produits espagnols !- et d'une capacité industrielle et touristique largement exploitée -ce qui n'est pas le cas-, serait actuellement un pays plus qu'émergent, ouvert largement sur l'extérieur, prospère et démocratique, bien mieux que la Turquie, son ancien maître !

 

 

 

Blois Mai/ Juin 2012 GeorgesOrdonnaud

 

1Il n'est pas inutile de rappeler, ce qui n'avait pas manqué d'étonner à l'époque, que dès 1945 deux députés communistes avaient été élus à Oran -ma ville natale- dont une femme (Alice Sportisse) et que la ville de Sidi-Bel-Abbes, elle même eut un maire communiste (M. Justrabo) !!

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